Elle fait ses premiers entrechats à l’âge de quatre ans à Kobe. Après s’être essayée à la natation, au piano, au tennis ou au dessin, Mari suivra sagement sa maman au cours de ballet afin de corriger sa mauvaise posture. « Quoi que tu choisisses, mets-y toute ton énergie », lui conseilla-t-elle. Alors, Mari choisit, ce sera la danse.
Quelles sont les difficultés de la formation et du métier de danseur ?
La discipline est inflexible, le travail quotidien. Si je suis épuisée, si mon corps me fait mal, je dois continuer à m’entraîner. Le plus grand défi, c’est de me dépasser chaque jour, toucher du doigt la limite. C’est difficile et stimulant à la fois. La majorité des danseurs sont ultra perfectionnistes. Pourtant, cet idéal de perfection reste inatteignable. C’est une bataille, on navigue entre idéal et réalité. Et comme sur scène, on ne peut rien cacher, tout ce que vous faites dans votre vie personnelle affecte votre danse.
Est-ce que la compétition, parfois cruelle, est une réalité dans la danse classique ?
Pour le moment, heureusement, je ne ressens pas de pression négative au Béjart Ballet Lausanne. Quand j’étais étudiante au Japon, en revanche, les danseuses avaient l’habitude de découper mes vêtements ou de cacher mes pointes le jour de la représentation. Avec du recul, je me dis qu’on pourrait en faire le scénario d’un film.
Quels ont été les principaux défis de ta carrière ?
À 15 ans, je me suis rendue en Allemagne pour étudier le ballet. Après deux semaines de travail, je me suis fracturé les deux pieds. J’ai dû arrêter de danser et rentrer au Japon pour me rétablir. Il m’a fallu presque un an pour m’en remettre. Pourtant, j’avais un rêve, danser en Europe. J’ai alors enchaîné les auditions pour les écoles de ballet. En visitant l’École-Atelier Rudra Béjart, j’ai eu la chance d’assister à la répétition de la compagnie professionnelle du Béjart Ballet Lausanne. C’était complètement nouveau pour moi, un véritable choc esthétique. J’ai décidé d’intégrer l’école dans le but de faire partie de cette compagnie. Et me voilà. Cinq minutes de répétition ont changé ma vie.
Décris-nous la journée d’une danseuse classique ?
Au BBL, les journées commencent à 11h15 par une heure et demie de cours de ballet, c’est un échauffement. Après 45 minutes de pause déjeuner, nous répétons jusqu’à 19h pour préparer les spectacles. En plus des heures quotidiennes de répétition en studio, les danseurs préparent leur corps en pratiquant des exercices supplémentaires. De mon côté, je m’entraîne à la salle de sport avant de commencer ma journée. Parfois, je fais de l’acupuncture et un massage après le travail.
Le rôle le plus difficile que tu aies dansé ?
Ce serait « La IXe Symphonie ». Nous devions la jouer au Japon et à Lausanne-Malley cette année, mais le confinement est passé par là. Je n’ai donc pas encore eu l’occasion de danser ce rôle sur scène. Ce ballet est une grande production rassemblant environ 250 artistes sur scène, dont le Ballet de Tokyo. Même si nous ne l’avons pas encore interprété, les répétitions ont été difficiles, mais inspirantes. Les exigences techniques sont très élevées et c’est un défi d’endurance. Actuellement, je travaille dur afin de partager cette incroyable chorégraphie de Maurice Béjart et j’ai hâte de la présenter devant le public de la Vaudoise aréna en juin 2021.
As-tu un mentor ?
D’abord, Gil Roman, le directeur artistique du Béjart Ballet Lausanne. Il m’a donné de nombreuses occasions de danser et incarne passionnément le vrai style de Maurice Béjart. Je pourrais aussi citer Keisuke Nasuno, Julien Favreau ou Elisabet Ros. Ils ont tous dansé avec Béjart. Leurs compétences en danse, leurs passions et leur éthique de travail en font d’eux les stars qu’ils sont aujourd’hui.
Quels conseils donnerais-tu à une personne qui rêverait de devenir danseur(euse) professionnel(le) ?
La discipline et le travail sont les seuls moyens de devenir ce que l’on veut être. C’est valable pour la danse et dans la vie.
©Photos : BBL ©Anne-Sylvie Bonnet
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