Edward Hopper compte parmi les artistes majeurs du 20ème siècle. Connu en Europe principalement pour ses peintures à l’huile de scènes de la vie urbaine produites dans les années 1920 à 1960, dont certaines ont acquis une popularité exceptionnelle, jusqu’à présent ses paysages avaient reçu moins d’attention. Étonnamment, aucune exposition importante n’avait encore été consacrée au regard porté par Hopper sur le paysage américain.
L’artiste new-yorkais développe un intérêt profond pour la couleur et une virtuosité extrême dans la représentation de l’ombre et de la lumière. Hopper a en outre su développer, à partir de ses observations, une esthétique dont l’influence se fait sentir non seulement en peinture mais aussi dans la culture populaire, la photographie et le cinéma.
En histoire de l’art, le terme «paysage» signifie une image de la nature, par opposition à la «nature» elle- même, toujours changeante, qui ne peut être fixée sous forme d’image. La peinture de paysage donne toujours à voir l’impact de l’homme sur la nature, ce que les peintures de Hopper reflètent de manière subtile et multiple. Il établit ainsi une approche distinctement moderne à un genre pictural traditionnel. À la différence de la tradition académique, les paysages de Hopper paraissent illimités; par la pensée, ils sont infinis et ne semblent toujours donner à voir qu’une petite partie d’un tout gigantesque.
Les paysages américains de Hopper sont des compositions géométriques claires. Les éléments principaux sont des maisons, symboles de la présence de l’homme. Des voies ferrées structurent les images à l’horizontale et incarnent l’ambition humaine de conquérir l’immensité du territoire. Un vaste ciel et des ambiances lumineuses particulières lumière éclatante de midi et lueur du crépuscule font apparaître l’immensité d’une nature en mutation permanente même dans une peinture en vérité statique. Un phare peut ainsi devenir un point de repère dans l’étendue de l’océan et de la côte.


Les peintures de paysage de Hopper donnent l’impression qu’il s’y agit en fait d’une chose invisible, qui se passe en dehors du tableau, ainsi que l’illustre par exemple sa toile Cape Cod Morning (1950): dans une fenêtre en baie, une femme au visage baigné de soleil scrute une chose qui demeure inaccessible au regard du spectateur parce qu’elle se situe en dehors de l’espace pictural. Les paysages visibles de Hopper ont toujours pour pendant des paysages invisibles et subjectifs, qui apparaissent à l’intérieur du spectateur. Comme toutes ses toiles, les paysages de Hopper sont empreints de mélancolie et de solitude.
Il émane souvent d’eux une impression d’étrangeté et de menace. Hopper montre aussi dans son œuvre l’irruption parfois brutale de l’homme dans la nature, mettant en relation paysages naturels et paysages urbains. Hopper a contribué de manière significative à établir la notion d’une Amérique mélancolique, marquée aussi par les faces sombres du progrès – un espace immense et sans limites, grandement popularisé en particulier par sa reprise et son développement au cinéma dans des œuvres telles La Mort aux trousses d’Alfred Hitchcock (1959), Paris, Texas de Wim Wenders (1984) ou Danse avec les loups de Kevin Costner (1990).
Le cinéaste Wim Wenders a réalisé spécialement pour cette exposition un court-métrage 3D exceptionnel intitulé Two or Three Things I Know about Edward Hopper, projeté dans une salle dédiée. Ce film constitue l’hommage personnel de Wim Wenders à Edward Hopper, qui l’a marqué durablement et a influencé son œuvre cinématographique. Wenders a parcouru les États-Unis en quête de l’«esprit» de Hopper, condensant les prises ainsi obtenues en un film, dont la première aura lieu lors du vernissage de l’exposition. Ce film montre de manière poétique et émouvante ce que le cinéma doit à Edward Hopper, mais aussi à quel point Hopper a été influencé par le cinéma.
L’exposition réunit 65 œuvres datant des années 1909 à 1965. Elle est organisée par la Fondation Beyeler en coopération avec le Whitney Museum of American Art, New York, dépositaire de la plus importante collection au monde d’œuvres d’Edward Hopper.
GAS
Huile sur toile 66.7 x 102.2 cm
The Museum of Modern Art, New York, Mrs. Simon Guggenheim Fund
© Heirs of Josephine Hopper / 2019, ProLitteris, Zurich
© 2019 Digital image, The Museum of Modern Art, New York / Scala, Florence
LIGHT HOUSE HILL
Huile sur toile 73.8 x 102.2 cm
Dallas Museum of Art, don de Mr et Mme Maurice Purnell
© Heirs of Josephine Hopper / 2019, ProLitteris, Zurich
Photo : Dallas Museum of Art, Photo by Brad Flowers
CAPE COD MORNING
Huile sur toile 86.7 x 102.3 cm
Smithsonian American Art Museum, Gift of the Sara Roby Foundation
© Heirs of Josephine Hopper / 2019, ProLitteris, Zurich
Photo: Smithsonian American Art Museum, Gene Young