Les cœlacanthes sont d’étranges poissons dont seules deux espèces vivent encore dans l’ouest de l’océan Indien et en Indonésie. Leur particularité réside dans leurs caractères anatomiques puisqu’ils sont pourvus de nageoires construites comme des pattes. Évolutivement parlant, ils sont donc plus proches des vertébrés terrestres, comme nous les humains, que des autres poissons. De plus, beaucoup de cœlacanthes évoluent très lentement, ce qui leur a valu le surnom de « fossiles vivants ». Une toute nouvelle étude publiée dans le Swiss Journal of Palaeontologyapporte de nouvelles connaissances sur l’histoire de ces étranges animaux.
Les fossiles de cœlacanthes sont rares, en particulier en Suisse où seules quelques espèces sont connues dans des roches du Trias des Grisons et du Tessin. En 1870, un chercheur de fossiles de Châtel-Saint-Denis, Joseph Cardinaux, vendait au Musée d’histoire naturelle de Berne des fossiles découverts à Teysachaux, un petit sommet situé près du Moléson dans le canton de Fribourg. Parmi ces fossiles datés du Jurassique inférieur ̶ soit âgés d’environ 180 millions d’années ̶ se trouve le squelette d’un cœlacanthe. À cette période, les Alpes n’existaient pas etune mer recouvrait une grande partie de l’Europe. Le fossile de cœlacanthe est resté dans la collection bernoise pendant 150 ans jusqu’à ce que, dans le cadre de sa thèse de doctorat effectuée au Muséum d’histoire naturelle de Genève et à l’université du même canton, Christophe Ferrante l’étudie en collaboration avec Lionel Cavin du Muséum de Genève et Ursula Menkveld‐Gfeller du Muséum de Berne. Il a découvert que ce fossile correspond à une nouvelle espèce nommée Libys callolepis, ce qui signifie le « Libys aux belles écailles ». Il s’agit du premier cœlacanthe découvert dans des roches datant du Jurassique en Suisse.
De petite taille, environ 30 cm, le poisson ressemblait au cœlacanthe actuel, le Latimeria. Cependant, il s’en distinguait par la possession de gros pores le long du crâne et sur ses joues qui permettaient à l’animal de ressentir les variations de pression et ainsi de détecter ses proies ou ses ennemis.
Le fossile étudié est aujourd’hui visible dans l’exposition Nager, marcher, voler – L’évolution des vertébrés du Musée d’histoire naturelle de Berne.
Cette étude fait partie d’un projet plus global portant sur l’histoire évolutive des cœlacanthes cofinancé par le Fonds National Suisse de la Recherche Scientifique conduit par Lionel Cavin au Muséum d’histoire naturelle de Genève.
Images : photo composite du fossile du Libys callolepis ©P. Vollenweider, NMBE ; Reconstitutions du Libys callolepis ©Lionel Cavin, Muséum Genève