Mitan des années cinquante. Jean Gabin alias le dabe est sorti des enfers des seconds rôles dans lequel il se cantonnait en revenant du front où l’homme, courageusement, a combattu l’ennemi germanique. Avant la guerre, Gabin fût une immense star, une gueule d’amour, des mirettes d’un bleu à faire vaciller la ménagère. Bref un cador qui enchainait les classiques, de “Pépé le moko” au “jour se lève”. Les tempes blanchies, la bedaine apparente, en 1945 Gabin doit s’évertuer à accepter de petits films pour crouter. Il faudra attendre “Touche pas au grisbi” et la cinquantaine pour un retour en grâce. Dès lors, le dabe n’a jamais lâché le haut de l’affiche en consolidant autour de son immense personne des cinéastes, des dialoguistes (souvent Audiard, pour notre plus grand plaisir) des techniciens et des comédiens de premiers plans. En juste dix piges, le dabe a simplement proposé à son public des classiques aussi majeurs que ” La traversée de Paris”, “Maigret et l’affaire St. Fiacre”, “le Président”, “Archimède le clochard”, “les grandes familles”, “Le cave se rebiffe” et ce “Baron de l’écluse”.
Une comédie douce-amère sur un vieil escroc sans le sou embarqué sur une rafiot gagné aux cartes à Deauville coincé sur une écluse et sans le premier franc pour subvenir à ses besoins, Gabin, impérial, y est à la fois drôle, touchant, élégant, cabotin et enfantin. Autour de lui les toujours impeccables Micheline Presle et Jean Desailly. Aux mots, Audiard enchaine des répliques d’une finesse et d’une acidité tendre. En contrepoids l’élégante Blanchette Brunoy, en tenancière d’un troquet où vient souvent s’échoué le vieux baron, se mets à rêver d’un lendemain avec cet homme aux manières élégantes. “Le Baron de l’écluse” est une comédie d’une grande joliesse et peut-être l’un des films les plus injustement mésestimé de l’immense comédien hélas trop tôt disparu en 1976.
N’hésitez pas…