Watchmen d’après le comics d’Alan Moore & Davie Gibbons
Il est inconcevable d’escompter résumer le pitch de « Watchmen ». On peut à la rigueur condenser le récit en le résumant à une dystopie, mieux une uchronie. Nous allons essayer de vous donner un aperçu du déroulé sans spoilers. Tulsa, nuit du 31 mai au 1erjuin 1921, des membres du KKK massacrent la population noire de cette petite ville du sud du pays en toute impunité. Quatre-vingt-dix ans après cet abominable fait réel (https://fr.wikipedia.org/wiki/Émeute_raciale_de_Tulsa) rien n’a réellement changé. Une faction ouvertement raciste et terroriste blanche, la 7èmeKavalerie, tente de contrôler le pays (le Président est l’ancien acteur démocrate Robert Redford) en s’affrontant ouvertement aux forces de police obligées de se masquer afin de protéger leurs anonymats et leurs familles. L’une d’entre elles, Angela, une maman afro-américaine, apprends qu’elle est la petite fille d’un survivant du massacre de Tulsa. Désormais centenaire, le vieillard détient un secret qui pourrait complètement chambouler l’équilibre non pas de cette petite ville engluée par les guerres raciales mais définitivement le sens du globe dans son ensemble.
Évidemment, c’est très résumé puisque nous avons décidé de ne pas dévoiler les personnages satellites qui vont propulser « Watchmen » aux confins de l’imaginaire, de l’étrange. En voici quelques exemples : pluie soudaine et répétée de céphalopodes sur Tulsa, la ville de New-York a été détruite lorsqu’une pieuvre géante s’y est écrasée en 1985 tuant d’un coup 3 millions d’individus, un châtelain inquiétant expérimente dans son royaume, entouré de serviteurs tous physiquement identiques, des tests incongrus afin d’échapper à sa condition de captif etc. Le tour de force de cette série unique (une seconde saison n’est pas prévue, la boucle étant définitivement bouclée avec cette unique fournée de 9 épisodes tous plus géniaux les uns que les autres) est de compiler avec une adresse affolante mille sensations allant de l’effarement, à l’empathie, de l’excitation (l’épisode 5 est un tour de force de réalisation, d’intelligence, d’ambition visuelle rarement vu sur un écran de TV) à la tendresse pour des personnages tous complètement à la marge. Avec « Wachtmen » nous pénétrons littéralement au cœur d’une œuvre de Francis Bacon. C’est à la fois d’une formidable inventivité, d’un vif plaisir télévisuel, d’une architecture audacieuse mais également exceptionnellement interprétés et mis en scène.
Nous ne pouvons que féliciter la RTS d’avoir eu cette audace. « Watchmen » est un objet rare incomparable.
Par Olivier Jordan
Crédits photos : RTS/Warnermedia